Débat avec Alain Besson sur l’islamisation (suite)

Sep 29, 2013 | Res Publica

Journaliste et écrivain, Alain Besson a exercé son métier à Ouest-France, où il a souvent rendu compte des activités de la Nouvelle Action royaliste. Après m’avoir interpellé sur mon blog Bertrand Renouvin et à la suite de ma réponse (1), Alain Besson précise son point de vue…

 

Cher Bertrand,

A la lecture de votre article sur Le mythe de l’islamisation (Royaliste n° 1038), où vous me faites l’honneur de me citer, me permettrez-vous de préciser ma pensée sur quelques points aux fins d’éviter tout malentendu de la part de quiconque n’aurait pas lu notre échange sur votre blog en date du 5 avril 2013?

1-Mon obsession à moi, ce n’est pas l’islamisation de la France mais la modernisation de l’islam, indispensable pour favoriser l’intégration des musulmans européens mais également pour dissiper des phobies qui ne relèvent pas toutes de l’imaginaire collectif et sont, en revanche, de nature à nourrir le discours xénophobe de l’extrême-droite.

Or, si j’en crois un certain nombre d’intellectuels musulmans, parmi lesquels des imams, cette modernisation, loin d’être acquise, demeure un enjeu fondamental.

Vous rappellerai-je que l’anthropologue Malek Chebel, en février 2006, déclarait : « l’islam doit se réformer en profondeur pour être compatible avec la laïcité » et dénombrait cinq chantiers urgents (et qui le demeurent !) : 1-favoriser une nouvelle interprétation des textes. 2-affirmer la prééminence de l’individu sur la communauté. 3-rappeler le primat du politique sur les religieux. 4- réévaluer le statut de la femme. 5-Décréter la « guerre sainte » «  inutile et dépassée. » (fin de citation).

De quoi méditer, non ?

Lors de notre précédent échange toujours, je citais, pour les approuver, d’autres contributeurs musulmans à la cause de la modernité, notamment Abdennour Bidar, Abdelwahab Medeb, Leila Babès, Soheib Bencheikh, Hassen Chalgoumi, Mohamed Sifaoui , liste non exhaustive.

3-Je ne m’étendrai pas sur l’UOIF, l’un des principaux interlocuteurs du gouvernement français, (l’UOIF qui détient au moins 50{9ef37f79404ed75b38bb3fa19d867f5810a6e7939b0d429d6d385a097373e163} des mosquées françaises), émanation des Frères musulmans ardemment combattus, outre méditerranée, par les démocrates et les croyants modernistes ; mais il y aurait beaucoup à dire.

 

4-Enfin, je revendiquais, et revendique toujours, en qualité de laïc républicain, le droit de critiquer les religions (islam compris), liberté conquise de haute lutte par Voltaire, Diderot et les Encyclopédistes depuis plus de deux siècles. Le droit de les critiquer ou interpeller sans encourir je ne sais quel anathème disqualifiant.

5-Ajouterai-je, avec votre permission, cher Bertrand, que la liberté de conscience, qui nous est chère à tous les deux, n’est pas la qualité première de la théologie islamique. Et qu’il serait opportun, sinon indispensable, que les républicains français exigent (courtoisement certes !) des différentes organisations musulmanes présentes sur notre sol qu’elles se prononcent solennellement sur ce sujet.

Bien à vous, cher Bertrand, en estime et en amitié.

Alain Besson

PS. Il va de soi que l’ostracisme dont vous êtes victime, de la part de la quasi-totalité des medias français, me scandalise !

 

Brèves remarques

Nous sommes, Alain Besson et moi, deux défenseurs résolus de la laïcité mais nous ne sommes pas dans la même situation. Mon interlocuteur et ami s’inquiète de la modernisation de l’islam, dénonce certains mouvements, exige une proclamation sur la tolérance : il pense et agit comme citoyen et je ne néglige pas ses inquiétudes. Dans notre organisation politique et dans « Royaliste », où se côtoient diverses formes de religion et d’irréligion, nous nous gardons de toute agressivité à l’égard des religions tout en informant nos lecteurs sur les théologies et sur la sociologie religieuse. Nous respectons une neutralité bienveillante qui cesse lors des extrémistes religieux pénètrent dans le champ politique et prétendent y imposer leur loi. Chez nous, les royalistes, le refus des partis religieux et des guerres de religion remonte loin dans notre mémoire. On ne nous prendra pas en défaut sur ce point-là.

Bertrand RENOUVIN

(1)    https://bertrand-renouvin.fr/libre-critique-des-religions-une-liberte-menacee-dialogue-avec-alain-besson/

Article publié dans le numéro 1040 de « Royaliste » – 2013

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