Léo Hamon : Vivre ses choix

Sep 23, 1991 | Res Publica

 

Sous la modestie de leur titre, les Mémoires de Léo Hamon révéleront à ses lecteurs, non à ses amis, le courage et la rectitude d’un patriote exemplaire.

Avant d’aller s’emparer, à la tête d’un groupe de Résistants, de l’Hôtel de Ville de Paris en août 1944, Léo Hamon se préoccupa de trouver une cravate. Le trait résume celui qui est alors un des principaux acteurs de l’insurrection parisienne : courage tranquille, sens de la légitimité populaire, souci de la dignité des fonctions publiques fussent-elles exercées provisoirement les armes à la main.

Voilà qui permet, mieux que par rémunération de titres et d’étiquettes, d’esquisser le portrait politique et moral qui s’affirme tout au long de ces Mémoires. Pour le compléter d’un mot, je dirai que Léo Hamon est demeuré l’homme de la fidélité à soi-même, à sa famille, à ses amis, à ses convictions tout au long d’un itinéraire – pas encore achevé ! – qui l’a conduit à connaître et à affronter les grandes épreuves et les principaux enjeux de ce siècle terrible.

Mais avant d’évoquer brièvement les choix d’une vie, je tiens à dire que mon article ne sera pas objectif. Résistant de la première heure, membre comme mon père et ma mère du mouvement Combat, Léo Hamon raconte dans quelles circonstances il rencontra un certain « Joseph », qui se présenta à Daniel Mayer comme « monarchiste et socialiste » … A lire ces lignes, chacun comprendra ce qui me lie à son auteur, par-delà toute autre considération. Par bonheur, il se trouve que les choix politiques de Léo Hamon le rendent proche de notre journal et de notre mouvement. Fils de révolutionnaires russes contraints à l’exil par l’échec de la Révolution de 1905, élevé en France et choisissant d’y demeurer lorsque ses parents rentrent dans leur patrie après 1917 pour continuer leur lutte dans les rangs bolcheviques, le jeune Léo Goldenberg (qui deviendra Hamon dans la clandestinité) mènera une aventure politique singulière, souvent marginale, qui le placera au cœur des enjeux et des événements. Homme de gauche assurément, il ne s’est pas engagé dans les grandes formations réformistes ou révolutionnaires. Résistant, heureux de voir les communistes participer à la lutte de libération, il ne sera pas un de ces compagnons de route prêts à toutes les concessions. Gaulliste, il sera sénateur MRP jusqu’à la bataille contre la Communauté européenne de défense, et non pas militant d’un RPF dont il récuse l’orientation droitière ; gaulliste toujours, il sera de la petite cohorte de l’Union Démocratique du Travail qui tente d’équilibrer les gros bataillons de l’UNR. Favorable à François Mitterrand, il ne rejoindra pas le Parti socialiste mais demeurera fièrement fidèle à un gaullisme de gauche qu’il continue de représenter au sein de la France unie.

Ce parcours d’un homme libre, dont les choix ont si souvent rencontré les nôtres, suffirait à nous rendre Leo Hamon sympathique. Il s’y ajoute le rôle important que ce sénateur républicain joua dans l’abrogation de la loi d’exil, puisqu’il s’y engagea « au-delà d’un banal vote », avec toute son autorité de Résistant hostile aux mesures à caractère raciste et avec toute sa conviction de démocrate soucieux de voir abroger une loi contraire aux droits de l’homme. De cet engagement, qui demandait plus de courage qu’on ne l’imagine aujourd’hui, est né une relation confiante et chaleureuse entre Léo Hamon et le comte de Paris dont nous sommes quelques-uns à avoir été les témoins, lors de débats récents où notre ami, avec son savoir universitaire, son expérience d’ancien ministre et sa grande délicatesse, reprit les arguments en faveur du régime actuel qui se trouvent résumés dans son livre. Ai-je assez dit ? Assurément non puisque cet « acteur réfléchi » a connu la plupart des figures de notre histoire politique et vécu les événements qui la scandent avec son cœur de Français  patriote et sa raison de juriste républicain. Qui ne connaît pas Léo Hamon ne manquera pas d’être touché et séduit.

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(1) Léo Hamon, Vivre ses choix, Laffont, 1991.

Article publié dans le numéro 563 de « Royaliste » – 23 septembre 1991

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