Plus qu’une révolte !

Oct 11, 2010 | la lutte des classes

Les choses tournent mal pour Nicolas Sarkozy et ses affidés. Je ne me fie pas aux sondages mais à la stratégie de l’Elysée et à l’évolution des rapports de force en France. Pendant tout l’été, le chef de l’UMP est resté le maître du jeu mais ce sont les grévistes et les manifestants qui ont rythmé le mois de septembre – et non pas des cortèges exigeant le renvoi d’un maximum de « Roumains ».

La démagogie du Président des riches est aujourd’hui en échec : dans la bataille politique pour la conservation de sa place, il refait la campagne présidentielle de 2007, exploitant comme on sait la thématique sécuritaire et xénophobe face à une gauche toujours « en retard » sur ce plan. Ce faisant, il fait irrésistiblement penser aux généraux des années trente qui voulaient refaire la guerre de 1914-1918 face à la nouvelle armée allemande. Nous expliquons dans ce numéro que Marine Le Pen ne rentrera pas obligatoirement dans les plans sarkozystes et il n’est pas sûr que la gauche se donne une candidate aussi facile à vaincre que Ségolène Royal.

Surtout, Nicolas Sarkozy est en train de se heurter à un énorme obstacle dans l’offensive de classe qu’il mène contre notre système de retraites. Il semble avoir estimé qu’il vaincrait les syndicats comme en 2003 mais, là encore, la bataille est différente : les futurs salariés lycéens et étudiants, les salariés en activité et les retraités ont compris depuis longtemps que la « rupture » sarkozyste était faite pour ruiner l’ensemble de notre système de protection sociale. Nous sommes à l’opposé d’une protestation égoïste, nous ne sommes pas dans une réaction de défense corporative avec ces « braves gens pris en otages » qui bénéficiaient de la sollicitude de TF1. Pour les grévistes et les manifestants comme pour cette forte majorité de citoyens qui sympathisent avec eux, la logique criminelle du capitalisme financier est devenue évidente et la complicité du gouvernement des riches non moins avérée. C’est déjà plus qu’une révolte : une révolution politique s’est faite en esprit. Elle s’accompagne d’un mouvement social exceptionnel.

Les manifestations auxquelles nous participons montrent la solidarité de toutes les générations contre la réforme des retraites, contre l’ultralibéralisme et contre les oligarques de droite : c’est là une défaite pour toute une droite qui misait, campagne de presse à l’appui, sur le conflit entre jeunes et vieux. Les parents ont peur pour leurs enfants et petits-enfants, les enfants veulent protéger leurs parents et, dès l’adolescence, ils savent qu’ils doivent lutter pour ne pas finir dans la gêne ou la misère. A l’optimisme d’une jeunesse éblouie par elle-même – celle des années soixante – a succédé une prise au sérieux fondée sur une expérience concrète de la régression sociale.

La gravité des uns, le désespoir des autres, jeunes ou vieux, ne se dissiperont pas par quelques rodomontades contre les voyous et par des rafles d’étrangers – les étrangers pauvres car les grands mafieux, qui n’ont jamais de problèmes de visa, mènent grand train sans être inquiétés. Il faut aussi souligner un phénomène social qui se manifeste depuis 1995 : les retraités sont de toutes les manifestations et les conseillers de Nicolas Sarkozy ont tort de considérer que les vieux sont tous des conservateurs peureux, qui ont la phobie des jeunes étrangers et qui voteront les yeux fermés pour celui qui a juré de débarrasser la France de ses voleurs de poule et de sacs à main. Là encore, quel mépris !

Nous sommes engagés dans une lutte qui ne cessera pas si un compromis sur les retraites parvient à être trouvé entre les syndicats réformistes et l’Elysée. Dans les rues de France, les slogans et les panneaux des manifestants le disent haut et fort : ce n’est plus le « Sarko » bling-bling qui est conspué, c’est le Président des riches qui est récusé, c’est l’utralibéralisme qui est rejeté.

Nous sommes encore loin de la victoire. Les oligarques de gauche se préparent à récupérer la révolte sociale puis à étouffer le désir de révolution comme ils l’ont toujours fait. Il faut les mettre au défi sur le programme de gouvernement. Il faut se mobiliser et militer pour la grève générale afin de créer une dynamique permettant de déjouer les calculs des infirmiers sociaux.

Editorial du numéro 976 de « Royaliste » – 2010

Partagez

0 commentaires