Crise en Serbie

Déc 8, 2003 | Chemins et distances

 

 

La Serbie est depuis toujours en Europe. Les médias français et les intellocrates naguère engagés dans les conflits balkaniques ont oublié cette évidence géopolitique.

Selon le dur jugement de Milan Kundera (1), ils n’aimaient pas pour eux-mêmes les Serbes, les habitants de la Bosnie, les Albanais – mais la souffrance des êtres plongés dans la guerre civile ou confrontés à la dictature. Cette souffrance confortait utilement leurs idées, leur position sociale, leurs intérêts éditoriaux.  Depuis la chute de Slobodan Milosevic, ils ne se soucient plus des malheurs qui continuent de frapper les Balkans – et de la souffrance que provoque l’abandon.

En France, l’indifférence n’est pas générale. Nos diplomates et nos soldats accomplissent leurs tâches avec une ardeur qui va souvent bien au-delà de leurs devoirs d’état et, par delà révolutions et conflits, de nombreux citoyens français expriment de mille manière leur amitié pour les peuples de l’Est européen.

Les royalistes de la NAR font partie de ces fidèles. Ils n’ont pas attendu le retour des rois et des princes dans leur patrie pour militer en faveur d’une coopération permanente et concrète avec la Bulgarie, la Roumanie, la Yougoslavie, l’Albanie. Ils plaident pour la paix et pour la stabilité politique dans les Balkans, selon la perspective d’une Europe confédérale unissant l’ensemble du continent. C’est pourquoi ils s’inquiètent de la crise générale qui affecte la Serbie (2).

Pour la troisième fois, l’élection présidentielle a été invalidée, faute d’une participation suffisante des électeurs le 18 novembre dernier. Et les élections législatives fixée au 28 décembre se préparent dans une totale confusion, sous le regard d’une population qui est au-delà de toutes ses déceptions. La détresse morale et la misère favorisent les extrémistes et durcissent les conflits sociaux. La plupart des Serbes se vivent comme d’anciens Yougoslaves, enfants d’une patrie qui n’existe plus, terriblement marqués par les guerres civiles puis par l’agression de l’OTAN et qui se demandent ce qu’il en est du Monténégro, du Kosovo, de la Bosnie. Personne, à l’Ouest, ne leur répond.

Dans cette situation tragique, les leçons de morale et les cours de démocratie sont parfaitement inutiles. L’aide économique et financière, indispensable, n’est pas non plus suffisante. En Serbie comme ailleurs, le peuple souffre et le pays se décompose parce que l’Etat perd chaque jour un peu plus sa légitimité, son autorité, sa consistance même.

Les royalistes de la NAR n’ont jamais pris parti dans les élections bulgares, albanaises, bosniaques et serbes. Ils continueront de se garder de toute ingérence dans les affaires de nations amies mais tiennent à livrer quelques réflexions de portée très concrète à ceux qui veulent bien les lire d’un bout à l’autre de l’Europe :

Dans tout pays confronté à une crise politique généralisée, il est essentiel de restaurer l’Etat dans sa fonction symbolique (il faut que l’unité nationale soit incarnée pour redevenir effective) et dans son dispositif juridique – par l’adoption démocratique d’une nouvelle constitution. C’est ce qui s’est passé avec le général de Gaulle en 1958, dans une situation de guerre civile.

Quant une nation a la chance d’avoir à sa disposition une dynastie historique, il importe que ses citoyens s’interrogent sur la manière dont le roi ou le prince pourrait à nouveau rendre service. Des réponses, différentes, ont été données en Bulgarie et en Roumanie – une autre s’esquisse en Albanie.

En Serbie et au-delà, le prince Alexandre de Yougoslavie s’est mis de multiples manières au service de son pays depuis son retour d’exil (3). Les récentes impasses électorales amènent ce démocrate incontestable (qui s’opposa résolument à S. Milosevic) à suggérer l’institution d’une monarchie parlementaire qui pourrait s’inspirer de l’exemple espagnol.  C’est désigner le chemin, parcouru dans bien d’autres peuples, d’une possible renaissance.

***

(1) Milan Kundera, L’ignorance, Gallimard, 2003. P. 157-158.

(2) pour une information complète, précise et équilibrée, cf. les traductions de la presse serbe publiées par l’indispensable Courrier des Balkans : http://www.balkans.eu.org/

(3) cf. les déclarations et le compte-rendu des activités du prince Alexandre sur le site  www.royalfamily.org

 

Editorial du numéro 827 de « Royaliste » – 8 décembre 2003

 

 

 

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