La mémoire rassemble le groupe et place le souvenir dans le sacré. L’histoire, toujours critique, invalide de bons souvenirs et en réveille de mauvais ; elle bouscule la mémoire, révélant ses failles et ses trop flatteuses reconstitutions.

Daniel Cordier était tout à la fois l’homme de la mémoire, comme acteur et comme témoin, et l’historien rigoureux qui a établi ou rétabli des vérités majeures sur la Résistance. Rentré dans l’ombre après la guerre, l’ancien secrétaire de Jean Moulin était venu à l’histoire pour répondre aux attaques dont l’Inconnu du Panthéon était l’objet.

L’œuvre monumentale que Daniel Cordier a consacrée au premier président du CNR a permis de contrebalancer le dénigrement de la France combattante qui fut à la mode dans les vingt dernières années du XXe siècle. L’historien aurait pu tomber dans le piège d’une mythification de l’homme qu’il avait servi et du combat qu’il avait mené. Son propre témoignage, dans “Alias Caracalla”, jette au contraire une lumière crue sur les conflits et les haines entre les chefs de la Résistance intérieure. Daniel Cordier sut dire cette vérité-là, qui n’était en rien secrète, tout en nous permettant de saisir quelques bribes de l’inexprimable : cette foi mystique dans les destinées de la France, cette fraternité des soldats de l’Armée des ombres qui transcendait les rivalités et la peur quotidienne.

En tous moments de sa longue vie, Daniel Cordier a bien mérité de la patrie.

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Article publié dans le numéro 1199 de « Royaliste » – novembre 2020.

 

 

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