Deuil : Jean-Marc Varaut

Juin 13, 2005 | Partis politiques, intelligentsia, médias

Mots clefs : Pierre Boutang | royalisme

 

 

Avocat célèbre, philosophe discret, royaliste fervent, Jean-Marc Varaut est mort le 26 mai. Yvan Aumont évoque son ami, qui fut proche de la Nouvelle Action royaliste et qui défendit à la fin de sa vie un de ses militants injustement accusé.

C’est un ami personnel que je pleure. Au tournant des années cinquante, Jean-Marc m’avait accueilli parmi les étudiants royalistes du Quartier latin si bien que je l’ai toujours considéré comme mon parrain en politique.

Il était alors secrétaire général des étudiants de la Restauration nationale, ce qui impliquant une responsabilité pour l’ensemble des universités française, en cette époque tumultueuse où tous les militants politiques étaient impliqués dans les luttes engendrées par le mouvement de décolonisation.

Depuis, nous ne nous sommes jamais perdus de vue. Premier secrétaire de la Conférence du stage des avocats de Paris, Jean-Marc-Varaut se fit très vite connaître et reconnaître comme excellent pénaliste et magnifique orateur. Il n’en demeura pas moins fidèle à ses convictions royalistes, qu’il inscrivit dans la grande tradition du libéralisme politique français.

Sa croyance religieuse, celle d’un catholique de tradition, sa fidélité politique, ses origines sociales et ses prises de positions dans les années quatre-vingt auraient dû lui valoir une étiquette de droite. Jean-Marc Varaut ne fut-il pas, de surcroît, l’avocat de Maurice Papon ?

Ce vieux compagnon échappait pourtant aux classifications partisanes. J’en veux pour ultime preuve les éloges, d’une remarquable justesse, publiés par Stéphane Durand-Souffland dans Le Figaro et par Jean-Michel Dumay dans Le Monde (1). Tous deux disent bien que cet avocat catholique et monarchiste, ancien défenseur de « soldats perdus » de l’Algérie française, avait pour amis proches ses confrères Roland Dumas et Jacques Vergès et que sa défense de Maurice Papon fut saluée par ses adversaires.

J’ajoute que cet ancien candidat du Parti républicain comptait parmi les sympathisants de la Nouvelle Action royaliste. Un débat avec Bertrand Renouvin, publié dans une revue aujourd’hui disparue, atteste que Jean-Marc Varaut défendait pour les mêmes raisons que nous la Constitution monarchique de la Vème République. Les auditeurs de nos Mercredis parisiens purent constater cette proximité intellectuelle et politique lorsque Jean-Marc vint présenter plusieurs de ses ouvrages et animer joyeusement les dîners qui suivaient la réunion.

L’indépendance d’esprit de notre ami venait sans doute de son éducation et de sa vive intelligence, mais aussi d’un travail acharné qui lui permit de développer ses qualités.

Parmi les rédacteurs de « Royaliste » certains se souviennent de ce grand avocat qui assistait aux séminaires de Pierre Boutang, prenant humblement des notes aux côtés de gamins et de gamines de vingt ans – et non loin de sa fille, Laurence-Alexandra – avant d’aller plaider une affaire difficile. Après licence, maîtrise et DEA, Jean-Marc Varaut soutint en 1984 une thèse sur « Crime et libre-arbitre, histoire critique du concept de responsabilité pénale » qui lui valut le doctorat d’Etat en philosophie. Bien des ouvrages suivirent, presque tous consacrés aux questions relatives au droit et à la justice (2).

Jean-Marc nous avait donné ces dernières années un ultime témoignage de sa fidélité en acceptant la défense de notre camarade et ami Ahmed, incarcéré dans une affaire de droit commun qui mériterait qu’on lui consacre un livre. A la suite d’un message que Bertrand Renouvin et moi lui avions adressé, il apporta une réponse immédiatement positive et prit un train pour Angers vingt quatre heures plus tard pour participer à la défense d’Ahmed avec une générosité désintéressée. Après avoir déposé comme témoin de moralité en compagnie de Jean-Yves Lignel et d’autres amis, Bertrand avait bavardé – sans pouvoir deviner que ce serait la dernière fois – avec celui qui fit le lendemain une excellente plaidoirie, hélas point décisive…

Avec Gérard Leclerc, nous avons été nombreux à assister à ses obsèques, en l’église Saint-Eustache. Jean-Marc Varaut est maintenant dans notre mémoire collective, à jamais.

Yvan AUMONT

Article publié dans le numéro 863 de « Royaliste » – 13 juin 2005

 

 

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