En finir avec les cabinets de conseil

Nov 30, 2022 | Partis politiques, intelligentsia, médias

 

L’ouverture de deux informations judiciaires sur le rôle des cabinets de conseil dans les campagnes présidentielles de 2017 et 2022 ne doit pas faire oublier l’enjeu politique du scandale McKinsey.

 L’affaire qui préoccupe le Parquet national financier n’est pas de celles qui éclatent dans un ciel limpide. Cela fait cinq ans que des observateurs avisés et des témoins dignes de foi évoquent les liens tissés entre l’état-major d’Emmanuel Macron et le cabinet McKinsey.

Si les juges en venaient à établir que des employés du cabinet américain ont travaillé gratuitement dans l’équipe de campagne du candidat, le sincérité des comptes de campagne serait mise en cause et Emmanuel Macron serait dans de beaux draps.

Bien entendu, l’intéressé affirme ne rien craindre et dénonce des “attaques politiques”. Il faut bien entendu respecter la présomption d’innocence et l’immunité dont bénéficie tout président de la République pendant la durée de son mandat. Cela dit, Emmanuel Macron a tort de dénoncer des adversaires qui “voudraient politiser” la question car celle-ci est essentiellement politique puisqu’elle concerne l’osmose entre la puissance publique et les sociétés privées.

Nous avons déjà souligné l’importance du rapport sénatorial consacré à l’influence des cabinets de conseil sur les politiques publiques. Remis le 17 mars dernier, le rapport dénonçait un “phénomène tentaculaire” amorcé sous la présidence de Nicolas Sarkozy et considérablement développé par Emmanuel Macron : entre 2018 et 2021, les dépenses des ministères en matière de conseils privés ont plus que doublé, passant de 379,1 millions à 893,9 millions. Qu’il s’agisse de la Santé publique, de la Justice ou de l’Armée, des millions d’euros ont été attribués à McKinsey, Citwell ou Accenture pour des études que les services de l’Etat auraient pu effectuer sans la moindre difficulté.

Ce n’est certainement pas l’efficacité que les commanditaires recherchent : le mode de gestion du secteur privé qui vise à maximiser son profit n’a rien à voir avec les missions de l’administration publique qui est au service de l’intérêt général. Les sociétés de conseil sont utilisées pour la privatisation de l’Etat, qui est l’objectif ultime de l’oligarchie et du haut patronat. La multiplication des passerelles entre le public et le privé permet en effet de se recaser fructueusement après un revers de fortune politique – ou dès qu’on a rempli son carnet d’adresses. Le haut patronat veut quant à lui – il ne s’en cache pas dans les conversations privées – récupérer à son profit les meilleurs parmi les serviteurs de l’Etat en laissant les administrations se peupler de médiocres que seront facilement impressionnables ou achetables.

Dans les mois qui viennent, de braves députés vont nous expliquer qu’il faut lutter contre les excès du recours au cabinets de conseil et encadrer cette pratique. On n’encadre pas un système de destruction et de corruption. On le détruit.

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Article publié dans le numéro 1245 de « Royaliste » – 30 novembre 2022

 

 

 

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