Lors de la cérémonie d’hommage aux quatre policiers assassinés par un islamiste, Emmanuel Macron a annoncé un « combat sans relâche » et le renforcement des « moyens humains, juridiques, technologiques ». Contre « l’hydre islamiste », il a appelé la nation à « s’unir, se mobiliser, agir » en formant une « société de vigilance » et non une société du « soupçon qui corrode ».
Après la révélation d’une faille terrifiante dans la sécurité du service de renseignements de la Préfecture de Police, une réplique en tous points déterminée s’imposait. Elle n’a pas eu lieu.
Bien entendu, on va prendre des mesures administratives et techniques pour éviter la répétition de la catastrophe du 3 octobre. Mais ce ne seront que des mesures partielles qui ne permettront pas d’éliminer un danger multiforme en raison de l’incohérence totale qui caractérise le combat contre « l’hydre islamiste ».
Première incohérence, qu’on trouvera peut-être mineure mais qui est significative : pour faire des économies budgétaires, le Premier ministre a décidé le 4 octobre, au lendemain de l’attentat, de supprimer l’Institut national des hautes études de sécurité et de justice (INHESJ) qui donnait une formation de haut niveau aux cadres de la sécurité. Jean-Dominique Merchet écrit que « C’était l’un des rares lieux où des personnels avaient l’occasion de débattre des questions de sécurité intérieure dans une grande liberté et de manière transversale. L’INHESJ publiait également des travaux d’études et de recherches. Il abritait l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP), qui fermera également ses portes ». Jean-Dominique Merchet nous apprend aussi que l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) a lui aussi failli être supprimé (1). L’obsession fanatique de l’équilibre budgétaire atteint ici un niveau démentiel.
Deuxième incohérence, majeure. On appelle les citoyens à dénoncer les comportements suspects mais on laisse l’Arabie saoudite et le Qatar financer massivement les mosquées et les « centres culturels » wahhabites-salafistes où se créent les ambiances favorables aux passages à l’acte terroriste. Dans un livre remarquablement bien informé (2), Pierre Conesa précisait en 2016 que chaque année, l’Arabie saoudite consacre 6 à 7 milliards de dollars à la propagande religieuse et au soutien à des mouvements subversifs ou franchement terroristes par la Ligue islamique mondiale, la Fondation islamique caritative al-Haramain, le Croissant rouge saoudien, ou encore l’université islamique de Médine qui a formé depuis sa création 45 000 cadres religieux de 137 nationalités différentes. Si le gouvernement veut vraiment combat “l’hydre islamiste”, il doit couper ses têtes saoudiennes et qatari, c’est-à-dire qu’il doit bloquer tous les financements étrangers de lieux cultuels et culturels suspects – même si cela nous prive de contrats dans les pays qui commanditent la subversion.
Troisième incohérence, non moins importante. L’appel lancé à la vigilance restera sans grands effets si le gouvernement ne précise pas que cette vigilance doit porter en premier lieu sur les élus locaux de droite et de gauche qui se font les complices des salafistes par calcul électoral. Combattre “sans relâche” l’islamisme, cela signifie que les partis doivent faire le ménage parmi leurs candidats et que, si ce ménage n’est pas fait, les citoyens ne doivent pas accorder leurs suffrages à ceux qui passent des marchés avec les salafistes.
Contre l’islamisme radical, les tâches de renseignement et de répression sont indispensables. Elles sont vouées à l’échec si les centres de propagande et d’agitation ne sont pas asséchés.
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(1) le blog de Jean-Dominique Merchet : https://www.lopinion.fr/blog/secret-defense/exclusif-l-inhesj-va-etre-supprimee-l-ihedn-a-eu-chaud-199746
(2) Pierre Conesa, Saoud et Mr. Djihad, La diplomatie religieuse de l’Arabie saoudite, Robert Laffont, 2016. Préface d’Hubert Védrine. Voir ma présentation du livre : https://bertrand-renouvin.fr/wp-admin/post.php?post=8212&action=edit
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