Pour deviner ce que dirait François Hollande lors de sa conférence de presse, il fallait avoir écouté sa prestation devant la Commission européenne… qui est dans la suite logique du Pacte budgétaire adopté à l’automne.
Dans les médias, on bavarde : François Hollande est-il devenu social-démocrate ou social-libéral ? La réponse a été donnée à l’automne dernier, lors de l’adoption du Pacte budgétaire (TSCG) : pour notre malheur, le président de la République est devenu « libéral » sans plus rien de « social » comme on le verra dans les mois qui viennent. Dès que l’on accepte le principe imbécile de l’équilibre budgétaire, on se place sous le contrôle de la Commission européenne qui impose un programme de « réformes structurelles » si le déficit est excessif.
De fait, les engagements pris à Bruxelles sont dans la suite du TSCG. François Hollande n’a pas compris qu’il passait un examen parfaitement humiliant pour la France – et pour lui-même, réduit à un directeur d’administration centrale planchant devant ses supérieurs. Le 15 mai, le président de la République a platement remercié la Commission de lui avoir accordé un sursis de deux ans pour le rétablissement des comptes – alors que Bruxelles masque par un geste faussement magnanime l’échec de la « règle d’or ». Puis il a promis dans une parfaite langue de bois de procéder aux « réformes structurelles » exigées par la Commission et par Berlin : « Le temps qui nous a été donné doit être mis au service de la compétitivité et de la croissance ».
La croissance ? Quelques heures avant l’exposé de François Hollande, on apprenait que l’économie française était entrée en récession. En ce cas, on évite les mesures déflationnistes, surtout quand l’expérience démontre leur malfaisance : grâce à la géniale politique dictée par Berlin, Bruxelles et Francfort, l’endettement de l’Espagne est passé de 58% à 100% du PIB en cinq ans et celui de la Grèce dépasse 170%. Comme ses voisins, le gouvernement français va donc persévérer dans l’erreur.
La partie étant jouée, la conférence de presse ne pouvait que se réduire à des confirmations aimablement enrobées. Le plan pour l’emploi des jeunes dans la zone euro est ridiculement faible. Demandé au Premier ministre, le plan d’investissement dans le numérique, la santé et les transports relève de l’effet d’annonce et il n’a même pas été question du fameux « pacte de croissance » qui, à l’automne, devait équilibrer le Pacte budgétaire. Nous avions dit qu’il s’agissait d’une fausse fenêtre. Le mensonge est maintenant avéré.
La relance du « gouvernement économique de la zone euro » est inutile puisque la Troïka opère déjà en Grèce, à Chypre et au Portugal selon les injonctions de Berlin, qui fait par ailleurs connaître ses exigences à Madrid, à Paris et à Rome. Même si une Troïka élargie déploie ses activités sous l’égide d’un « président nommé pour une longue durée » comme le souhaite François Hollande, c’est l’Allemagne qui continuera de faire prévaloir son point de vue d’autant plus brutalement que le président de la République a refusé toute confrontation avec Berlin. L’alignement est complet et François Hollande, qui a fait voter le TSCG, se situe dans la continuité de Nicolas Sarkozy qui avait signé ce maudit traité. Le « gouvernement économique » existe et il applique par le biais de ses diverses structures oligarchiques une seule et même politique : la déflation.
Or les effets de la politique de déflation sont aussi prévisibles qu’une conférence de presse présidentielle. Après deux ans de stagnation, la récession en France rend impossible le redressement de la courbe du chômage puisque la baisse de la demande des ménages qui subissent une importante contraction du pouvoir d’achat s’accompagne d’une baisse de l’investissement productif.
La pression sur les retraites et sur les salaires conjuguée à l’austérité budgétaire aggravera la récession. Avec les prochaines « réformes structurelles », nous allons suivre le chemin de la Grèce, de l’Espagne, du Portugal. Il faut bloquer le processus et descendre dans la rue contre le plan sur les retraites, dès qu’il sera connu.
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Article publié dans le numéro 1036 de « Royaliste » – 27 mai 2013
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