Fronde policière

Nov 8, 2016 | la lutte des classes

 

Les manifestations nocturnes de policiers vont bien au-delà des revendications matérielles : dans le défi immédiat aux autorités, elles visent la restauration de l’autorité de l’Etat.

L’attaque au cocktail Molotov de deux véhicules de police le 8 octobre à Viry-Châtillon, au cours de laquelle quatre policiers ont été blessés, a fait déborder la colère qui montait depuis plusieurs mois. Accablés de tâches administratives, confrontés à la menace terroriste, directement visés par les voyous et par l’islamisme radical – deux policiers assassinés à Magnanville le 13 juin –, chargés du maintien de l’ordre lors des grandes manifestations sportives et syndicales, obligés d’assumer, à Calais et à Paris, les conséquences de la désastreuse « gestion » politique des migrants, il est évident que les policiers de tous services et de tous grades n’en peuvent plus.

Le gouvernement aurait dû prendre au sérieux la manifestation nationale du 7 avril dernier qui avait réuni des milliers de policiers à Paris et des centaines d’autres dans plusieurs métropoles régionales à l’appel de leur plus puissant syndicat : Unité SGP Police (Force ouvrière). Il était alors permis d’espérer que cette mobilisation syndicale se conjugue avec les manifestations contre la loi El Khomri et contraigne le gouvernement à reculer. La pulsion gauchiste du syndicat info’com CGT dénonçant la répression policière sur une affiche outrancière – dénoncée par la CGT Police – avait créé un vif malaise. Mais ce sont surtout les anarchistes du Black bloc qui ont empêché la jonction entre les policiers et les manifestants.

Les activistes du Bloc noir ne sont pas des « casseurs » mais des jeunes gens, Français et étrangers, qui ont une pratique conforme à leur théorie. Bien entraînés, ils visent les bâtiments qui symbolisent le capitalisme et l’Etat et harcèlent méthodiquement les forces de police. Ces violences spectaculaires attirent les médias et une petite foule de sympathisants qui ne voient pas que la théorie anarchiste qui inspire les blocs noirs – rassemblements éphémères dans des groupes « autonomes » qui refusent toute autorité – les condamne à une esthétique de la révolte qui contrarie les luttes sociales. Tel fut le cas au printemps dernier.

Les cortèges nocturnes qui se sont formés à Paris et dans plusieurs grandes villes sont aussi la conséquence de l’échec des derniers mois dans la généralisation du mouvement social. La fronde policière est a-syndicale ou antisyndicale. Minoritaire, illégale, elle ne peut être calmée par une allocation soudaine de crédits et d’équipements car elle est fondamentalement politique. Elle demande que l’autorité soit restaurée dans la rue et dans l’Etat – au moment même où diverses enquêtes confirment la corruption et l’irresponsabilité des hiérarques de droite et de gauche.

Les contradictions se multiplient et s’aiguisent.

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Article publié dans le numéro 1109 de « Royaliste » – 8 novembre 2016

 

 

 

 

 

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