Front national : Conflit sur la ligne

Fév 9, 2016 | Non classé

 

A la faveur des élections départementales, européennes et régionales, les vedettes du Front ont occupé le devant de la scène médiatique à tel point que beaucoup ont cru à une irrésistible ascension. Mais…

Mais le deuxième tour des régionales a rappelé une vieille vérité : le Front national repousse plus qu’il ne séduit et, faute d’alliance, il ne pourra pas participer au pouvoir ni même disposer d’un nombre suffisant de députés pour peser sur la représentation nationale.

Cependant, le parti offre des possibilités de carrières locales qui ouvrent maints appétits. Dès lors, certains cadres frontistes souhaitent élargir ces possibilités par des aménagements de ligne permettant de séduire l’électorat de la droite classique et certains de ses élus. D’où le renforcement d’une tendance représentée notamment par Louis Aliot, le compagnon de Marine Le Pen, et par Marion Maréchal-Le Pen. Faute de textes théoriques, il est difficile de se faire une idée exacte des débats internes mais, sur fond de xénophobie, il est possible de repérer deux tendances :

Les « sudistes » mêlent les thèmes des identitaires, de l’extrême-droite catholique et du libéralisme économique (défense des petits commerçants et des petits patrons) et réclament plus ou moins clairement un abandon de la campagne contre l’euro.

Les « nordistes », autour de Florian Philippot, insistent sur le rôle de l’Etat, développent des thématiques « sociales » plus que « sociétales » et militent pour la sortie de l’euro.

Comme tout chef de grand parti, Marine Le Pen s’est toujours maintenue en surplomb des deux tendances afin de garder tous ses cadres – le parti en est pauvre – et de séduire le maximum d’électeurs. Les deux tendances ont accepté cet équilibre jusqu’aux régionales mais la pression des « sudistes » est devenue trop forte pour que Marine Le Pen étouffe les divergences. Mais l’élection présidentielle se rapproche et la présidente – incontestée – du Front national doit empêcher que le débat interne ne se transforme en une guerre de clans.

Les divergences tactiques peuvent, comme dans les autres partis, être masqués par les éléments de langage fabriqués par les communicants afin que le Front national reste un parti attrape-tout. Mais les habiletés langagières et les motions chèvre-chou ne pourront pas cacher le casse-tête  stratégique du Front : une progression décisive ne peut se faire que sur les ruines de la droite classique, or celle-ci n’a pas éclaté et le Front sert de marchepied aux « républicains » et aux « socialistes ». Sur les programmes libéraux ou ultralibéraux, la droite et la gauche s’affronteront au premier tour pour que François Hollande ou Nicolas Sarkozy, voire Alain Juppé, devienne le champion de la bataille contre l’extrême-droite au second tour. Après 2017, beaucoup d’électeurs frontistes risquent d’abandonner le marchepied…

***

Article publié dans le numéro 1094 de « Royaliste » – 9 février 2016

 

Partagez

0 commentaires