Gauche : Qui sont les assassins ?

Juin 21, 2014 | Partis politiques, intelligentsia, médias

 

Devant le Conseil national du Parti socialiste, le 14 juin, Manuel Valls a déclaré que la gauche pouvait mourir. Erreur ! Elle est déjà morte. Et nous savons qui l’a tuée.

La réunion se tenait à huis clos mais le secret n’était pas sérieusement gardé. Il fallait que l’opinion publique sache que derrière les portes fermées à double tour se déroulait une tragédie digne de l’antique : l’irrésistible montée du Front national et « le risque de voir Marine Le Pen au second tour de la présentielle » avec un pays qui peut se « défaire » et « se donner à Marine Le Pen » car, « oui, la gauche peut mourir ». Les commentateurs ont glosé sur la solennité de la mise en garde là où je vois filouterie, grandiloquence et aveuglement.

Le risque lepéniste au second tour ? C’est en fait la seule chance pour François Hollande de l’emporter car n’importe quel candidat de droite classique le battrait par simple phénomène de rejet. Telle est la filouterie.

La France qui se donne à Marine Le Pen ? C’est l’appel à la mobilisation antifasciste qui devrait permettre de rassembler la gauche, le centre et la droite modérée autour du sauveur qui arrivera, comme il se doit, tout casqué à l’arrière d’un scooter. Grandiloquence et pitrerie.

La Gauche qui peut mourir ? Elle est morte et nous tenons à jour, depuis trente ans, la liste de ceux qui l’ont saignée : Jacques Delors, Michel Rocard, Lionel Jospin, Dominique Strauss-Kahn, François Hollande et tant d’autres…

Je m’empresse d’ajouter Manuel Valls à cause de la phrase dont on a vanté la lucidité : « Nous sentons bien que nous sommes arrivés au bout de quelque chose, au bout peut-être même d’un cycle historique pour notre parti. » On peut en effet estimer que le Parti socialiste est un moribond qui peut se relever. En ce cas, il faut se « réinventer », comme dit le Premier ministre. Mais il est parfaitement absurde d’ajouter qu’il faut « tenir bon » sur les réformes (ultralibérales) et sur « les choix économiques qui sont les nôtres » car « prendre un autre chemin nous conduirait à l’échec ». Autrement dit :

1/ Nous risquons de mourir, ce qui, pour un parti, est un échec ;

2/ Pour survivre, nous devons faire une révolution interne pour enclencher un nouveau cycle ;

3/ Cette révolution consiste à rester dans la logique qui a conduit la gauche à l’échec car si elle dévie de sa pente fatale elle ira à l’échec.

Une telle stratégie politique est démente mais la tactique politicienne est cohérente : quelle que soit l’ampleur de l’échec, Marine Le Pen sera là pour sauver la gauche en lui fournissant l’épouvantail antifasciste qui lui permettra de persévérer dans son non-être.

Nous sommes dans une partie de cartes, où seul le mort joue et gagne. Etrange, non ?

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Article publié dans le numéro 1059 de « Royaliste » – 21 juin 2014

 

 

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