Karim Aga Khan

Fév 20, 2025 | Chemins et distances

 

Survenue le 4 février, la mort de Karim Aga Khan m’affecte et me peine. Grâce à l’ambassade de France au Tadjikistan, j’avais pu rencontrer Hakim Feeresta, représentant diplomatique de l’Imam à Douchanbé puis Hadi Hosseini le chef de mission pour le Gorno-Badakhshan (Pamir). Ce dernier, devenu très vite un ami, avait organisé en août 2004 et 2005 mes deux premiers voyages dans cette région de hautes montagnes qu’on atteignait après un long et superbe voyage, pour partie le long du Piandj qui sépare Tadjikistan de l’Afghanistan. Je crus comprendre que l’Imam avait eu des paroles de grande bienveillance à mon égard et l’accueil que je reçus au Badakhshan fut des plus chaleureux. Il en fut de même en octobre 2004 à Londres, où je pus m’entretenir longuement avec le Docteur Chafik Sachedina, directeur des Affaires diplomatiques de l’Aga Khan, et les directeurs de l’Institut d’études ismaéliennes et de l’Institut pour l’étude des civilisations musulmanes.

Mes séjours dans le Pamir, mes entretiens londoniens et mes relations avec les bureaux français de la Fondation Aga Khan m’ont permis de découvrir une organisation d’une remarquable efficacité, vouée à l’accomplissement d’un projet de développement d’une non moins remarquable cohérence. Sous l’impulsion de Hadi Hosseini et de Zahur Aman Shah, coordinateur régional de l’assistance humanitaire pour le Gorno-Badakhshan, j’ai pu visiter le lycée et l’hôpital de la capitale régionale, Khorog, parcourir le site de la future université d’Asie centrale, admirer le pont jeté sur le Piandj vers l’Afghanistan, descendre dans la salle des turbines d’un barrage en construction, puis séjourner à Murghab, une ville à 3 600 mètres d’altitude, près de la frontière de Chine, terriblement appauvrie par le départ de l’Armée soviétique. Au début des années quatre-vingt-dix, la Fondation Aga Khan avait sauvé de la famine les 200 000 Pamiris ismaéliens et les habitants kirghizes de la famine.

De mes observations et conversations, j’ai tiré une étude sur la conception ismaélienne du développement que la revue “Monde en développement” a bien voulu publier. Après avoir souligné la cohérence d’une politique associant l’éducation (avec le souci prioritaire de l’éducation des femmes), la santé publique, la prévention des risques dans une région hautement sismique, les projets portant sur l’énergie, les communications, le développement rural et l’assistance humanitaire, j’avais souligné le rôle décisif du 49e imam des Ismaéliens, descendant du Prophète. Un rôle symbolique et concret, concret parce que symbolique, assurant par son autorité incarnée la conjonction de la vie spirituelle et de l’existence matérielle, de la mystique et de la politique, de la tradition religieuse et de la modernité économique et sociale.

A mes amis ismaéliens, j’adresse mes très vives condoléances, dans le souvenir des moments exceptionnels vécus en leur compagnie.

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Article publié dans le numéro 1295 de « Royaliste » – 20 février 2025

 

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