Depuis bientôt cinq ans, la fraction droitière de l’oligarchie détient la totalité du pouvoir exécutif – l’Elysée et Matignon – et la majorité absolue dans les assemblées parlementaires. Les oligarques de gauche – la direction du Parti socialiste – s’est contentée d’une opposition molle, interrompue par le pacte implicite noué avec la droite pendant la campagne du référendum.

C’est dire que Jean-Pierre Raffarin, Dominique de Villepin et leurs ministres ont pu agir avec une liberté d’autant plus grande qu’ils bénéficiaient du soutien des groupes industriels et financiers, de l’audiovisuel public et privé et d’une grande partie de la presse écrite.

L’opposition populaire a quant à elle été traité avec un parfait mépris : le gouvernement n’a pas tenu compte du référendum de 2005 et son recul sur le CPE ne l’empêche pas de préparer de nouvelles offensives pour disloquer le droit du travail.

Somme toute, les conditions idéales étaient réunies pour une mise en œuvre efficace des recettes ultralibérales censées rétablir la situation économique et sociale. Malgré les mensonges statistiques, les présentations enjolivées des résultats et le silence complice des chaînes de télévision, il n’est pas difficile de constater l’échec cinglant de gouvernements dont Nicolas Sarkozy fut et reste l’un des membres les plus éminents.

Succédant à Lionel Jospin, champion des privatisations, la « gouvernance »de droite a poursuivi l’entreprise de liquidation du secteur public et nationalisé. Elle a accepté la désindustrialisation de la France – marquée par la perte de Péchiney, entre autres entreprises passées sous contrôle étranger. Elle a assisté sans mot dire à la fusion entre Alcatel et Lucent qui va sa traduire par de nombreuses suppressions d’emplois dans notre pays. La baisse de notre production industrielle, constatée depuis six mois, la laisse sans réaction.

La gouvernance de droite se trouve confrontée à un déficit commercial de plus en plus inquiétant (22, 936 milliards d’euros en 2005, 29, 211 milliards en 2006) qui est la conséquence de la désindustrialisation et de l’euro fort. Madame Lagarde, ministre en charge du commerce extérieur, reconnaît que nous avions moins d’entreprises exportatrices qu’en l’an 2000 mais avoue qu’elle n’a pas de « réponse définitive » à ce « vrai sujet de préoccupation ». Quant à l’euro, le gouvernement français pouvait invoquer le référendum de 2005 pour exiger une révision radicale de la politique monétaire en zone euro. Mais il a choisi, là encore, de ne rien faire. Contrairement à ce qu’affirme depuis des années la propagande patronale, ce n’est pas la France qui est paresseuse, mais la gouvernance ; ce ne sont pas les Français qui ont peur des réformes mais les fiers-à-bras qui invoquent le patriotisme économique et qui n’osent pas déclencher une crise salutaire dans l’Union européenne.

Quant au chômage, la seule politique suivie est celle de la manipulation et de l’occultation. Fin janvier, nous avons appris que l’INSEE reportait au mois d’octobre la publication des chiffres annuels du chômage qui a d’ordinaire lieu en mars. Cette manœuvre misérable n’a pas empêché la diffusion de chiffres officieux qui montrent que la gouvernance a perdu la bataille des statistiques sur l’emploi – le nombre de chômeurs effectifs étant à tous égards accablant.

Il faut que Nicolas Sarkozy s’explique sur cet échec, qui est son héritage. Il faut qu’il dise aux Français, autrement que par les formules creuses des discours qu’on rédige pour lui, comment il compte rétablir notre situation économique et sociale.

Comme la plupart de ceux qui ont voté Non au référendum de 2005, nous tenons pour inutile ou fâcheux tout candidat qui ne se prononcerait pas clairement pour une reconstruction de l’Union européenne incluant le contrôle politique de la BCE, l’instauration d’un nouveau tarif extérieur commun ; pour la planification souple du développement industriel national et la nationalisation des secteurs clés ; pour l’augmentation massive des salaires dans le cadre d’une nouvelle politique des revenus.

Telle est la première liste des critères qui nous permettront de faire notre choix.

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Editorial du numéro 898 de « Royaliste » – 19 février 2007

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