Non au « traité constitutionnel »

Mai 5, 2005 | Union européenne

NON A L’IMPOSTURE

Notre projet européen étant connu, publié, explicité (1), il nous reste à répondre aux représentants des hautes classes qui se répandent dans les médias pour proférer les toujours mêmes accusations : les partisans du Non seraient de mauvais bergers, des joueurs de flûte menant un troupeau fasciné vers le chaos.

« Ils mentent !» s’exclame Jacques Delors, repris par les amis de François Hollande. Nous voici incités à faire notre examen de conscience et à nous interroger sur le statut de la vérité, quant aux affaires européennes.

De prime abord, toute une partie de la campagne des partisans du « traité constitutionnel » se situe hors de la vérité et du mensonge puisqu’ils s’efforcent de disqualifier les opposants et d’intimider les hésitants par l’annonce de catastrophes. De gauche ou de droite, les oligarques cherchent à obtenir un acquiescement résigné ou, du moins, une abstention prudente.

C’est une tactique peu glorieuse. A tout prendre, nous préférons la vérité exprimée par Ernest-Antoine Seillière lorsqu’il déclare que « La Constitution est un progrès pour une économie plus flexible, plus productive et pour un Etat allégé » et nous souhaiterions que le Medef vienne défendre, chaque jour sur les ondes et les écrans, le traité qui comble ses vœux ultralibéraux. Ce serait l’occasion d’un franc débat, alors qu’il y a aujourd’hui dans la « communication » des hautes classes une bonne part d’incommunicable – qu’on peut aussi appeler mensonge par omission.

Cette remarque ne nous dispense pas de « revenir à la vérité du texte » comme l’exige Jacques Delors. Mais la première vérité, démontrée ici même, est que ce texte n’est pas la « Constitution » qu’il prétend être mais un simple traité. Les mensonges par omission sont des vétilles, par rapport à cette imposture.

Il s’y ajoute un certain nombre d’assertions sur les droits garantis par un texte qui serait riche de multiples avancées sociales. La discussion fait rage sur ce point. Elle est parfois difficile à suivre car les partisans du traité nous présentent comme vérités en actes des séries de proclamations de portée douteuse. Le procédé n’est pas nouveau :

Entre 1986 la signature de l’Acte unique a été assortie de la promesse, faite par la Commission européenne, de la création de millions d’emplois.

En 1988, Jacques Delors, président de la Commission, déclarait que « les avantages économiques et sociaux de la réalisation du programme 1992 pourraient consister en un surcroît de croissance de 4,5{9ef37f79404ed75b38bb3fa19d867f5810a6e7939b0d429d6d385a097373e163} et une création nette de près de 2 millions d’emplois ».

En 1992, lors du débat sur le traité de Maastricht, toute la classe dirigeante annonça un regain de croissance et la création massives d’emplois.

Entre 1995 et 2001, la propagande pour la monnaie unique se fit en aussi sur la croissance et l’emploi et nul n’a oublié que le Pacte de stabilité portait dans son intitulé l’engagement pour la croissance.

Puisque la capacité d’oubli est très forte au sein de l’oligarchie, il faut encore citer, entre autres recueils de pétitions de principes et de promesses non tenues, la « charte communautaire des droits sociaux fondamentaux » adoptée par le Conseil européen de décembre 1989, le protocole social annexé au traité de Maastricht, le Livre vert sur la politique sociale européenne de novembre 1993, la « charte sociale » intégrée au traité d’Amsterdam de 1997…

Pendant qu’on se congratulait sur les « avancées » de l’Europe sociale, les directives de la Commission désorganisaient les économies nationales et le culte de la monnaie forte produisait ses effets ravageurs en Europe de l’Ouest.

Il faut enfin noter que, depuis vingt ans, toutes les étapes vers l’ultralibéralisme ont été présentées selon un schéma en trois points : on déplore une Europe en déclin ; on signe un pacte libéral assorti de formules rassurantes ; on annonce que les contestataires seront tenus pour responsables du désastre s’ils ne cèdent pas à l’impérieuse nécessité d’aller de l’avant. Quelques années plus tard, les mêmes oligarques nous menacent d’en rester au traité précédent – rédigé par leurs soins mais qu’ils déclarent mauvais (Amsterdam) ou abominable (Nice).

Le 29 mai, nous ne céderons pas au chantage de ces incapables, nous refuserons un traité chargé d’illusions.

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Editorial du numéro 860 de « Royaliste » – 2006

 


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