Ségolène Royal : Qu’elle tire les leçons !

Nov 27, 2006 | Partis politiques, intelligentsia, médias

Ségolène Royal déclare que « la politique doit partir de la réalité de la vie des gens, être attentive aux leçons que le peuple donne ». La candidate socialiste officielle peut immédiatement donner des exemples concrets à l’appui de ces beaux principes.

Les « gens » ont fait l’expérience dans leur vie quotidienne de la forte hausse de prix engendrée par le passage à l’euro. Leur « diagnostic partagé » se résume ainsi :ceux qui ont organisé la propagande en faveur de la monnaie unique se sont trompés ou les ont trompés.

Les « gens » attendent peut-être les excuses publiques d’une candidate qui veut « changer la politique » au nom des valeurs. Ils attendent plus probablement la dénonciation de l’euro fort, la définition d’une nouvelle politique monétaire pour la France et l’Europe et un examen critique de la zone euro. En bonne logique, cette leçon sur la monnaie devrait entraîner un rejet du social-libéralisme hypocritement pratiqué par les gouvernements auxquels Ségolène Royal a appartenu. 

Il faut ensuite tirer la leçon que le peuple français a donnée le 29 mai 2005. Le Non massif implique une offensive politique contre l’ultralibéralisme bruxellois et la renonciation explicite à tout projet de « constitution européenne ».

 L’annonce publique de cette rupture n’est pas suffisante. Une relance de l’Union européenne est nécessaire. Compte tenu des débats qui ont eu lieu pendant la campagne dans le camp des vainqueurs, il serait judicieux de proposer que l’Union prenne une forme clairement confédérale, avec primauté du Conseil des chefs d’Etat et de gouvernement, réduction de la Commission à des tâches de simple exécution et contrôle politique d’une Banque centrale européenne dont les missions sont à redéfinir. 

Compte tenu des réalités dramatiques auxquelles d’innombrables entrepreneurs et commerçants sont confrontés, avec les conséquences que l’on sait sur le niveau de l’emploi, il est urgent de se prononcer pour l’organisation d’un système de protection douanière de l’Europe continentale.

Autre leçon : la longue résistance opposée par les ouvriers, les employés et les cadres aux programmes de destruction des services publics et de liquidation des entreprises nationales. Ségolène Royal, qui a entériné les privatisations opérées par le gouvernement Jospin, doit se mettre à l’écoute du peuple français qui se sait exposé à une pénurie d’énergie électrique depuis la grande panne du 4 novembre. Elle devrait par conséquent annoncer la restauration et le développement des services publics et la nationalisation des secteurs qui sont indispensables à l’indépendance de la nation.

Quant à la participation aux décisions collectives, il serait heureux qu’elle engage un débat public sur l’organisation d’une planification souple et démocratique, associant dans ses commissions les syndicats et les autres organisations représentatives de la société française.

En tirant ces premières leçons, décisives, Ségolène Royal resterait dans le rôle auquel elle prétend. Les autres aspects de la vie économique et sociale doivent être confiés au parti ou à la coalition qui aura la tâche de préparer la campagne des législatives. Comme le dit très justement Nicolas Dupont-Aignan, il est contraire à la tradition de la République gaullienne que les partis politiques adoptent un programme de législature avant l’élection, à tous égards décisive, du chef de l’Etat. Respecter le rythme politique de la 5ème République, gravement perturbé par le quinquennat, c’est permettre au peuple tout entier de débattre et de choisir en connaissance de cause. 

« Changer la politique » ? Nous prenons Ségolène Royal au mot. Et pour bien nous faire comprendre, nous emploierons une expression tirée de la langue de bois du ségolénisme triomphant : notre « expertise citoyenne » nous conduit à observer que Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy ont été tous deux partisans du Oui, de même que Jacques Chirac, autre candidat possible de la droite, et Dominique Strauss-Kahn, nouvel homme fort du Parti socialiste.

 L’absence de partisan du Non parmi les candidats susceptibles d’entrer à l’Elysée crée une situation dangereuse, dans les urnes et dans la rue. Que la candidate socialiste se le tienne pour dit. 

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Editorial du numéro 892 de « Royaliste » – 27 novembre 2006

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