Colère. L’accord de Lisbonne sur le traité européen porte sur une imposture. Le texte qui va être soumis à ratification par les Etats-membres de l’Union est une version pas même simplifiée mais légèrement édulcorée du « traité constitutionnel » que le peuple français avait rejeté.
Comme ils l’avaient annoncé dès juin 2005, les oligarques européens ont préservé le dispositif juridique qu’ils avaient choisi, estimant qu’il n’y en avait pas de meilleur, et effacé les mots (« Constitution ») et les formules (« concurrence libre et non faussée ») qui avaient fâché les opposants. Ce faisant, ils se sont arrogés le pouvoir de distinguer, dans l’ancien traité, ce que les peuples français et hollandais avaient rejeté et ce qu’ils avaient accepté. Comme si le « traité constitutionnel » n’avait pas été dénoncé dans sa totalité – dans son idéologie ultralibérale, dans ses principes fondamentaux, dans les pouvoirs qu’il instituait, dans les normes qu’il faisait prévaloir.
L’intention cyniquement affirmée était de ne pas tenir compte du choix démocratiquement exprimé. A cet égard, les oligarques ont tenu la promesse qu’ils s’étaient faite et Nicolas Dupont-Aignan souligne à juste titre le commentaire de Valéry Giscard d’Estaing, lors d’une audition devant la commission des affaires constitutionnelles du Parlement européen : « En termes de contenu, les propositions demeurent largement inchangées, elles sont juste présentées de façon différente. La raison de ceci est que le nouveau texte ne devait pas trop ressembler au traité constitutionnel. Les gouvernements européens se sont ainsi mis d’accord sur des changements cosmétiques à la Constitution pour qu’elle soit plus facile à avaler ».
Comme d’habitude, les citoyens sont tenus pour des imbéciles et on croit dans les hautes sphères que nous serons rassurés par quelques gommages (on supprime la référence au drapeau européen, mais le tissu bleu continuera de flotter) et que nous serons incapables de comparer les textes de 2005 et de 2007. Tel ne sera pas le cas. Mais Valéry Giscard d’Estaing s’en moque puisque, en France, le traité de Lisbonne ne sera pas soumis à référendum.
Le déni de démocratie est patent et Nicolas Sarkozy veut qu’il soit entériné par les parlementaires dès le mois de décembre. Nous devons donc nous engager immédiatement dans la campagne qui vise à obtenir, malgré tout, un nouveau référendum. Ceci afin que nous puissions exprimer notre hostilité à un projet de traité qui reprend les dispositions inacceptables (1) contenues dans la défunte « constitution » :
Le projet de traité maintient la référence à une Charte des droits fondamentaux qui aura force obligatoire et qui proclame dans son préambule la libre circulation des marchandises, des services et des capitaux : les prescriptions ultralibérales y sont réaffirmés comme principes intangibles ; l’ensemble du texte est restrictif par rapport à la Déclaration de 1789 et au Préambule de 1946…
Il maintient un système qui nie le principe de séparation des pouvoirs : la Commission assure le contrôle de légalité tout en assumant des tâches d’exécution ; le Conseil des ministres, organe de l’exécutif, exerce un rôle législatif conjointement avec le Parlement européen.
Il confirme la soumission à l’OTAN « qui reste, pour les Etats qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre ».
Il confirme le statut d’indépendance absolue et les missions de la Banque centrale européenne, organisme non démocratique dont le rôle est manifestement catastrophique.
Il confirme l’établissement de plusieurs personnages dans des situations qui provoqueront conflits de pouvoirs et confusions : président du Conseil européen, président (désormais élu) de la Commission, haut représentant pour la politique étrangère (au lieu du « ministre des Affaires étrangères »).
Dans sa malfaisance et son absurdité, le projet de traité confirme la défunte « constitution ». Nous confirmons notre Non.
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- la Déclaration de politique générale du 24ème congrès de la Nouvelle Action royaliste, 20 mars 2005.
Editorial du numéro 912 de « Royaliste » – 29 octobre 2007
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