Promu par les médias, un petit groupe de pression demande que les dirigeants politiques français fassent apparaître un « Obama » national. La requête est pour le moins paradoxale.

Deux jours après les élections américaines, l’obamania était retombée comme un soufflé. Des militants habiles peuvent cependant l’exploiter pendant quelques semaines. C’est ainsi que Patrick Lozès, président du Conseil Représentatif des Associations Noires de France (CRAN), s’est acquit une petite notoriété lorsqu’il a demandé aux politiques de « prendre des mesures pour que ce qui arrive aux Etats-Unis arrive aussi en France ». Autrement dit, le CRAN recommande une politique de discrimination positive. Comme ce groupe de pression semble avoir compris que la discrimination positive est dans le même temps une discrimination négative, il préfère évoquer une « action affirmative ». Ce qui revient à traduire en mot-à-mot l’affirmative action américaine dont nous avons montré l’échec théorique et pratique (1).

La pirouette sémantique ne neutralise pas l’opacité de l’argumentation sur la noircitude :

  • la représentation nationale est une représentation politique. En droit, le député législateur est représentant de la nation – et non le mandataire d’une « race » ou d’un sexe. En fait, des traditions de pensées, des intérêts de classe et des projets s’affrontent au Parlement – et peu importe les particularités physiques de celles et ceux qui les expriment.
  • demander de tout faire pour qu’un président « noir » soit élu, c’est confondre la Représentation et le chef de l’Etat. Celui-ci ne peut se réclamer d’un groupe « racial », ou social sans que les autres groupes se sentent exclus. Pourquoi un « Noir » aurait-il un souci plus aigu du bien commun qu’un « Jaune » ou un « Blanc » ? Condolezza Rice est bushiste, l’aurait-on oublié ? Personne n’a remarqué que le « Noir » Barack Obama avait au cours de sa campagne éliminé deux femmes : Hillary Clinton et Sarah Palin. Sur le sol qui vit renaître le féminisme, la racialitude a triomphé de la féminitude alors qu’on nous avait raconté que toutes les minorités dominées étaient solidaires ! En France, le Parti socialiste vient de donner un spectacle édifiant, quant au destin de ces prétendues minorités : un homme qui ne fait pas mystère de sa différence a été battu par deux femmes qui ont pulvérisé, au cours de leur lutte haineuse, tout le discours sur la sororité hérité des années soixante-huit.
  • Il est paradoxal, enfin, de promouvoir une modèle racialiste « à l’américaine » dans notre pays, tout en présentant Barack Obama comme celui qui a dépassé la confrontation raciste pour incarner la nation américaine.

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Article publié dans le numéro 936 de « Royaliste – 1er décembre 2008

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