Depuis trois mois, un très important mouvement social se développe en France. Depuis trois mois, le Front national se tient dans l’abstinence médiatique et publie quelques communiqués mi-chèvre mi-chou mais résolument hostiles aux syndicats en lutte.
Marine Le Pen ? La grande vedette médiatique n’est pas là. Marion Maréchal-Le Pen ? Elle est ailleurs, par exemple en Italie à la mi-mars pour rencontrer ses amis identitaires de la Ligue du Nord qui veulent détruire l’unité italienne. Cohérente, la jeune Marion l’est doublement puisqu’elle suit une ligne conservatrice, libérale et identitaire qui évacue la question décisive de l’euro. Mais la présidente du Front national et son conseiller Florian Philippot ? Tous deux laissaient entendre, par petites phrases bien balancées, qu’ils avaient la fibre sociale. Pourtant, au moment où une intersyndicale menée par la CGT et Force ouvrière mène la lutte contre la loi El Khomri en multipliant les manifestations et les grèves, le Font national se tait. Enfin presque… Les sites frontistes publient tout de même quelques communiqués qui constituent un bel exercice d’équilibrisme. En pleine période de tension sociale, on invoque la France apaisée – c’est le slogan de Marine Le Pen pour la présidentielle. Ceci pour mieux renvoyer les adversaires dos à dos : le gouvernement qui a utilisé l’article 49-3 et qui obéit aux injonctions de Bruxelles (1) et les syndicats qui veulent paralyser le pays. Marion Maréchal-Le Pen joue la même musique en affirmant que les Français sont pris en otage par deux minorités : le gouvernement et une CGT sectaire. Prise d’otages ? La formule est d’une fascinante originalité. Surtout, les rédacteurs des communiqués marinistes et marionistes oublient que la lutte associe la CGT, Force ouvrière, Sud, la FSU, les syndicats étudiants et lycéens. Comme le gouvernement, comme les grands médias, le Front national cible la seule CGT… Plus significatif encore : la dénonciation des grèves et l’appel lancé au gouvernement pour qu’il fasse évacuer les raffineries occupées par les grévistes. Les syndiqués et les salariés en lutte contre la loi El Khomri qui ont apporté leurs suffrages au Front national ces dernières années se souviendront de l’hypocrisie frontiste. Ses dirigeants dénoncent une loi antisociale dictée par Bruxelles mais quand vient l’épreuve de force qui peut aboutir au retrait du texte, on appelle le gouvernement à réprimer les syndicalistes ! Telle est le véritable sens de la France apaisée : sous les propos à l’eau de rose, l’extrême droite des briseurs de grève pointe son vilain nez.
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- Ce thème a été piqué à Coralie Delaume. Voir son excellent article dans Le Figaro du 16 mai : http://www.lefigaro.fr/vox/ politique/2016/05/17/31001-20160517ARTFIG00137-ce-que-la-loiel-khomri-doit-a-l-union-europeenne.php
Article publié dans le numéro 1102 de « Royaliste » – 4 juin 2016
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