L’esprit d’un monde sans esprit

Fév 13, 2015 | Partis politiques, intelligentsia, médias

                                 

Invoquer « l’esprit du 11 janvier » est devenu un rituel qui s’accompagne d’appels à l’unité nationale. Pourtant, les dirigeants socialistes continuent sur la même pente ultralibérale.

La conférence de presse du 5 février avait été mise sous le signe de « l’esprit du 11 janvier » et François Hollande, regonflé par la hausse de sa cote, voulait se placer dans la continuité des grandes manifestations populaires qui ont suivi les attentats. Le commentaire médiatique est entré dans ce récit et, sur l’incontournable BFM TV comme dans la presse régionale, on ne tarissait pas d’éloge sur ce François Hollande qui avait revêtu les habits du président de la République.  Comme cette prise de fonction se produit à mi-mandat, on se dit qu’il est d’autant plus tard que la campagne pour 2017 a déjà commencé : François Hollande risque de ne pas garder très longtemps son costume présidentiel.

On aurait tort de faire la mauvaise tête. Un petit moment de présidence est toujours bon à prendre et François Hollande est dans son rôle lorsqu’il tente une médiation dans la crise ukrainienne en espérant que la chancelière allemande sera de bonne compagnie. On aurait été heureux de le voir prendre des initiatives en faveur du gouvernement grec mais il reste collé au gouvernement allemand alors que la victoire de Syriza donne l’occasion inespérée de transformer radicalement l’Union européenne.  Comme s’il ignorait que la France est une grande puissance, François Hollande a horreur de se porter à l’avant-garde pour bouleverser la partie engagée : il lui faut toujours être accompagné, de près ou de loin, par Angela Merkel, Jean-Claude Juncker et autres guides généralement mal inspirés.

Sur la scène intérieure, c’est la même démarche pusillanime dictée par les arrangements médiocres et les comptes parcimonieux. François Hollande invoque la cohésion nationale mais la loi Macron continue d’être débattue au Parlement alors qu’il s’agit d’une entreprise multiforme de régression sociale dictée par l’idéologie ultralibérale : la lutte de classes, c’est toujours le patronat qui la mène. Il annonce des mesures pour l’enseignement et un développement du service civique alors que de telles décisions demandent un effort budgétaire très important qui est incompatible avec la politique d’austérité. Même chose pour l’Armée : on va ralentir les diminutions d’effectifs alors que la France a besoin de plus d’hommes et de plus de moyens pour protéger les Français et accomplir ses opérations extérieures. Le bruit des grandes annonces sur la laïcité, la restauration de l’autorité, le développement économique des territoires couvrent de froids arbitrages sous l’œil inquisiteur de Bercy.

Il s’agit, encore et toujours, de remporter la partie électorale aux moindres frais. L’esprit du 11 janvier a sombré dans le mégotage.

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Article publié dans le numéro 1072 de « Royaliste » – 13 février 2015

 

 

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