La France n’est pas confrontée à une crise de régime : les institutions de la Vème République ne sont pas sur le point de s’effondrer, par vétusté et inadaptation. Nos institutions ont été mises à l’épreuve de divers changements conjoncturels qu’elles ont su dominer. Elles sont depuis une quinzaine d’années gravement perturbées par la dérive oligarchique provoquée par l’adoption du quinquennat. Mais c’est par un retour aux principes de la République gaullienne, non par sa liquidation, qu’il faut en finir avec la confiscation du gouvernement de la France par une « caste ».
La crise politique dont le premier tour de l’élection présidentielle est le symptôme est une crise du système partisan. Les primaires étaient censées assurer la perpétuation du Parti socialiste et des Républicains. L’élimination de François Fillon et de Benoit Hamon montre que le déclin de leurs partis respectifs ne tenait pas à des questions de personnes, de structures et de procédures, mais à la trahison des principes du gaullisme dans un cas, à la trahison des principes du socialisme dans l’autre. Les millions de voix qui se sont portées sur Nicolas Dupont-Aignan, au terme de sa courageuse campagne, et sur Jean-Luc Mélenchon incarnant les attentes et les colères d’une large fraction de la gauche, montrent la possibilité d’une recomposition sur d’authentiques traditions politiques nationales.
Le succès de Nicolas Dupont-Aignan sera prometteur si Debout la France est l’axe d’un rassemblement pour la souveraineté de la nation. L’échec de Jean-Luc Mélenchon tient aux lourdes ambiguïtés de ses plans de sortie des traités européens, que l’annonce d’une Constituante rendait encore moins crédible. On ne peut mener une bataille contre les moulins à vent de la « monarchie présidentielle » quand les forces de l’argent et la technostructure européiste coalisées par Berlin préparent un kriegspiel sur le modèle grec.
Comme d’habitude, Marine Le Pen a voulu capitaliser sur toutes les angoisses et toutes les colères mais le vote de protestation dont elle bénéficie largement ne lui permet pas d’incarner le rassemblement national en raison de la logique d’exclusion qui demeure dans son programme et qui reste attachée à son nom.
Emmanuel Macron a su capter des désirs contradictoires en promettant à la fois le rajeunissement du personnel politique et le maintien du statu quo face aux programmes présentés par les candidats populistes. Il a rallié à sa personne de vieux hiérarques de droite et de gauche, des caciques municipaux, des intellectuels médiatiques en fin de carrière et obtenu le soutien enthousiaste du patronat et de la banque. Il est le candidat du renouvellement d’une oligarchie décidée à maintenir l’ordre injuste des choses et les logiques violentes qui sont à l’œuvre dans la modernité : libre-échange, déflation, ubérisation. Il invoque le patriotisme, mais l’atlantisme est pour lui une donnée aussi naturelle que la domination allemande. En appelant à voter pour Emmanuel Macron, nous nous ferions les complices d’un imposteur qui se présente, face à Marine Le Pen, comme un rempart paré de toutes les vertus démocratiques et républicaines. On ne nous refera pas le coup de 2002, lorsque Jacques Chirac avait réuni sur la peur d’un fascisme imaginaire une immense majorité qu’il s’est empressé de trahir. L’ancien ministre de François Hollande est celui qui poursuivra et durcira, après Nicolas Sarkozy et François Hollande, la politique d’inégalité sociale et de fracturation territoriale.
Même par colère, même par dégoût, nous n’appellerons pas à voter pour Marine Le Pen. Nous n’acceptons pas que le principe du droit du sol soit remis en cause. Nous n’acceptons pas le double discours du Front national, xénophobe pour flatter une base identitaire, gaulliste pour séduire l’ensemble des patriotes. Entre le nationalisme et le patriotisme, il faudra que Marine Le Pen choisisse.
Nous refusons de préconiser l’abstention, qui signifie l’indifférence. Par le vote blanc, nous voulons signifier que le choix pour le deuxième tour est pour nous impossible mais que nous sommes prêts pour un rassemblement de type nouveau pour la défense de l’indépendance de la nation. En France, en Europe, l’heure est aux surgissements politiques.
Le vote blanc est malheureusement nécessaire contre les impostures clairement démontrées.
L’élection du président de la République au suffrage universel n’est plus un héritage gaulliste. Le retour au septennat ne pourrait détourner ce mode de scrutin de sa nature antirépublicaine.
Merci pour votre position, mais il faudrait pouvoir le partager su r FB